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Blog littéraire.


Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes dévorés par le feu.

Publié le 15 Octobre 2012, 21:01pm

Cercle est l'histoire d'un homme, Jean Deichel, qui choisit de déserter sa vie et d'habiter le monde. Après avoir quitté son travail, au coeur de Paris, il se met à l'écoute des couleurs et des sons, des gestes et de la richesse inépuisable du sentir. Après qu'un homme se fut jeté des tours de Notre-Dame, laissant derrière lui son manteau, telle une trace invisible de l'être, le narrateur fait à son tour l'expérience du vide et, emmitouflé dans le manteau magique, part à la rencontre des phrases qui rendront compte de son odyssée. Paris devient alors une fête illuminée par les gestes aériens d'Anna Livia, danseuse fétiche de Pina Bausch. Puis, en dépit du sang qu'il perd en abondance, le narrateur part pour Berlin où l'enfer concentrationnaire s'offrira à lui dans sa continuité tragi-comique, sous les traits grimaçants de pseudo artistes nihilistes en perdition, shootés au désir de destruKtion et ayant troqué leur militantisme contre des imprécations apocalyptiques face à l'impossibilité de vivre dans un monde où tout est réduit à sa valeur d'échange. Marx s'amuse en douce et poursuit ses palabres que nul n'entend. L'errance du narrateur aux semelles de vent le conduira finalement en Pologne puis en Tchéquie où il retrouvera la trace d'Anna Livia.
L'impossible est donc au centre même de ce roman faisant du renversement de la métaphysique son projet scintillant et douloureux à la fois. L'expérience du vide ou du néant est à vivre, intensément, dans les retranchements de sa chair et de son esprit afin que puisse s'éprouver l'autre nom secret de l'impossible : l'accomplissement dans la jouissance ou la béatitude la plus parfaite. La connaissance, nous souffle Jean Deichel, n'est pas seulement source d'angoisse et soeur du renoncement, elle doit ouvrir à la possibilité même de l'amour, fût-il cerné par la stridence des cris s'échappant des charniers. Devant une neige, un être de toute beauté s'avance vers nous : le visage est celui d'une phrase revenant éternellement sur son propre éveil, celui de toutes les phrases s'étant écrites sous les feux de l'illumination rimbaldienne, de l'épiphanie joycienne et tout aussi bien des éclats de paradis sollersien. Amis lecteurs, c'est maintenant qu'il faut reprendre vie.

Yannick Haenel, Cercle, Coll."L'Infini", Editions Gallimard.

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