Ce passant ordinaire aimé des fées

Publié par olrach sur 13 Février 2013, 21:02pm

Philippe Sollers, puisqu'il faut le nommer, nous livre ses mémoires, un vrai roman. Le titre est à l'image de l'esprit de notre gascon héroïque, tout emprunt d'ironie et de saveur. L' auteur revient inlassablement sur son parcours : de Tel quel à L'Infini, en passant par le double adoubement de Mauriac et d'Aragon, l'errement maoïste, la sacralité papale et l'épicurisme foncier et libertaire. Plaidoyer pro domo en forme de défense de l'esprit de contradiction, seul apte à épouser le caractère immuable et inépuisable des méandres de la vie. Haro sur la société et ses spectres spectaculaires, éloge de l'infini du Verbe seul enclin à la transsubstantiation de l'enfer en paradis dicible et vivable. Car le paradis sollersien est avant tout terrestre, bordelais, on s'en doute, vénitien et atlantique, sacralité de l'île de Ré si souvent célébrée. La figure tutélaire de Dante n'est jamais loin et l'on s'étonne parfois, à la lecture de ces Mémoires, de se dire que Sollers bientôt ne sera plus. Scandale? Les forces de l'esprit m'environnent, je vous quitterai sans regret. Et ultime pirouette épicurienne : le sage ne craint pas la mort, la vie ne lui est pas un fardeau, et il ne croit pas que ce soit un mal de ne plus exister. De même que ce n'est pas l'abondance des mets mais leur qualité qui nous plaît, de même, ce n'est pas la longueur de la vie, mais son charme qui nous ravit. Philippe Sollers n'a pas d'âge, savez-vous, il n'est d'ailleurs pas encore né. La dernière bénédiction sera en l'honneur de l'ami de toujours : Nietzsche, problablement. Ne plus prier, bénir l'éternel retour de notre éveil dans la chair rose et bleu virginale des mots et des phrases, amen.

Philippe Sollers, Un vrai roman : Mémoires, Editions Gallimard.

Le désespoir est une défaite.

Du masochisme considéré comme un des beaux-arts.

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